Joseph Lipp (1887 - 1948)
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Joseph Lipp naît le 28 juillet 1887 à Hirsingen (Reichsland Elsass-Lothringen). Il est désigné dans l'état-civil sous les prénoms Josef Anton Bernhard. Ses parents sont François Joseph et Philomène Lipp, née Walch. Joseph a une grande sœur, Joséphine, née le 1er juillet 1883, un petit frère Eugène, né le 16 mars 1889, et trois petites sœurs : Philomène, née le 22 juillet 1892, Eugénie, née le 15 juillet 1894 et Wilhelmine, née le 29 janvier 1899.
Nous ne connaissons pratiquement aucun détail sur les années de jeunesse de Joseph hormis le fait que son père semblait être un homme extrêmement dur au niveau de l'éducation. Joseph était un homme de grande taille pour l'époque (estimée à 1 m 82), d'une belle carrure, qui possédait de très beaux yeux bleus et remportait un franc succès auprès des femmes (2).
Après avoir effectué son service militaire de 1907 à 1909, Joseph fait la connaissance vers 1910 de Célestine Mann, native de Wettolsheim. Le couple se marie le 20 octobre 1911 alors que Célestine est enceinte de cinq mois ! Célestine donne naissance à Aimé, le 20 février 1912, puis à Alice le 7 mars 1913 à Drulingen où la famille a déménagé.
Durant la Grande Guerre, Joseph passe cinq années loin de sa famille (voir cette partie de sa biographie) qui s'est établie chez les Mann à Wettolsheim. Après la guerre, les Lipp et les Mann restent très liés, notamment Joseph Lipp et les oncles Henri et Jules Mann. Joseph alla chaque année jusqu'à la fin de la seconde guerre mondiale les aider pour les vendanges. Les trois hommes aimaient échanger leurs souvenirs de guerre tout en fumant la pipe après le travail dans les vignes. Les enfants de la famille se rassemblaient souvent autour d'eux pour écouter les hommes deviser en dialecte alsacien (1).
Au retour de la guerre, la famille Lipp se réinstalle à Drulingen (Bas-Rhin). Il est à noter que l’arrondissement de Drulingen est à majorité luthérienne et que les protestants, liés à la culture allemande, avaient adoptés une attitude réservée lors du retour de l’Alsace à la France (6). Claire Lipp y naît le 14 juin 1920. Joseph est employé à la fabrique Alsatia où il est comptable. Il est également pompier volontaire tout comme l'avait été son père. Joseph devient sous-lieutenant de la brigade de Drulingen le 24 juillet 1921 après un vote de l'ensemble de la troupe des pompiers.
Dans le courant de l’année 1925, la famille Lipp s'installe à Sarrebourg (Moselle) où d'après les recensements de la population de 1926 puis 1931, ses membres sont dialectophones mais parlent également le français.
Suite à la faillite de l'entreprise Alsatia (voir cette partie de la biographie de Joseph), les Lipp déménagent en 1938 et s'installent définitivement à Obernai (Bas-Rhin). Joseph y monte une entreprise de brosses et de balais qui connaît un certain succès avant que n'éclatent les hostilités. Après la défaite de 1940 et l'annexion par l'Allemagne nazie, l'activité de l'entreprise a beaucoup plus de mal à se maintenir (3).
Durant la période d'annexion, Joseph a de nombreux problèmes avec l'occupant allemand. D'une part il porte le béret basque ce qui est interdit, d'autre part il continue à employer le français pour s'exprimer. Il est un jour convoqué et menacé par un responsable local de l'administration allemande d'Obernai, devenu Oberehnheim, qui l'accuse de ne pas pratiquer l'allemand dans sa famille en indiquant comme preuve que son chien répond aux ordres en français (3) ! Le risque encouru était d'être envoyé au camp de Schirmeck qui fut mis en place par les nazis pour " rééduquer " les Alsaciens et où de nombreuses atrocités furent commises. Durant ces quatre années, les Lipp sont également séparés de leurs enfants partis se réfugier en France.
A la fin de l'année 1944, alors que les combats font rage aux portes de l'Alsace, Joseph héberge en prenant de grands risques, un groupe d'une vingtaine de jeunes hommes de Wettolsheim qui risquaient d'être incorporés de force dans la Wehrmacht. Ces " malgré nous " âgés de 16 ans (classe 1928) avaient été incorporés au RAD (Reichsarbeitsdienst), service obligatoire des jeunes en Allemagne, et envoyés réaliser des travaux de fortifications au col du Donon pour retarder l'avancée des alliés. Voici le témoignage d'Adrien Lichtenberger, président des anciens combattants de Wettolsheim, au sujet de cet épisode : " Dans la nuit du 21 au 22 novembre 1944, les Allemands qui envisageaient de nous emmener en Allemagne, nous ont fait monter dans un train direction Strasbourg - Kehl. A Molsheim, le train ralentit un moment et nous sommes descendus en douce pour partir à pied et en vitesse en direction d'Obernai. Et c'est là qu’Henri Mann nous a emmené chez son oncle (Joseph Lipp) à Obernai. Après un accueil chaleureux et un déjeuner copieux malgré la restriction, M. Lipp a voulu nous cacher, mais vu l'importance du groupe, nous avions décidé de rentrer chez nous ce qui nous a permis de ne pas passer le conseil de révision dont nous avions eu la convocation et avec cela l'incorporation dans la Wehrmacht " (5).
Une lettre datée du 8 décembre 1945, envoyée par Célestine Mann à sa fille Alice, nous indique que son mari est visiblement en bonne santé. L'année suivante, Joseph Lipp tombe malade assez rapidement (4). Il doit alors mettre fin aux activités de son entreprise. En 1948, ne pouvant plus se déplacer, il prend toujours Claire Mann sur ses genoux pour lui faire des blagues (1). Joseph Lipp succombe d'un cancer du colon à Obernai le 29 octobre 1948. Il est à noter que les risques d'être atteint de ce cancer sont fortement accrus en cas de tabagisme, de consommation d'alcool et de régime alimentaire comportant beaucoup de viande rouge (10). Tous ces facteurs étaient cumulés par Joseph Lipp ainsi que l'exposition à l'amiante durant sa vie professionnelle (briques réfractaires des fours Alsatia) qui est également un facteur d'apparition de ce cancer (9). Durant sa maladie, Joseph reprocha par contre à sa femme de lui avoir trop fait mangé de chou alors qu'il s'agit d'un légume qui protège plutôt de cette maladie (3) !
Sources familiales : 1 : Claire Mann, nièce de Joseph Lipp 2 : Alice Keichinger, fille de Joseph Lipp 3 : François Morel, d'après le témoignage de Célestine Lipp, épouse de Joseph Lipp 4 : lettre du 8 décembre 1945, envoyée par Célestine Mann à sa fille Alice Autres sources : 5 : témoignage d’Adrien Lichtenberger, président des anciens combattants de Wettolsheim Bibliographie générale : 6 : Wahl A. , Richez J.C. (1994) L’Alsace entre France et Allemagne 1850 - 1950, Hachette, Paris, p. 251 7 : article paru dans " Le petit provençal " du 09 février 1929 8 : Carnets du bourreau Anatole Deibler 9 : Oluremi A Aliyu, Mark R Cullen and others. Evidence for excess colorectal cancer incidence among asbestos-exposed men in the beta-carotene and retinol efficacy trial. American Journal of Epidemiology 162(9): 868-878 (2005) Sites internet : 10 : http://www.e-sante.fr
Vendanges en octobre 1919. Quelques mois après leur libération du front, les hommes de la famille reprennent le travail de la vigne.
Joseph Lipp en compagnie d’Henri (dans l’ombre) et Jules Mann avec l’aide du jeune Aimé Lipp
Maria Mann, alors enceinte, aide au pressoir en compagnie de son mari Henri et de Joseph Lipp
Les familles Mann et Lipp (Joseph de dos et sa fille Alice debout à gauche) pendant le déjeuner dans les vignes
Joseph Lipp, sous-lieutenant de la troupe des pompiers de Drulingen en 1925
La famille Lipp photographiée dans son jardin du 31 avenue Clemenceau à Sarrebourg pour la Pâques 1929.
Communion de deux nièces de Joseph Lipp en mai 1930. Les quatre soeurs de Joseph sont présentes. De gauche à droite : Wilhelmine, Marie Joséphine, Eugénie et Marie Madeleine
Joseph et Célestine Lipp en compagnie de leurs trois enfants photographiés le 22 avril 1935
Joseph Lipp en compagnie d’un groupe d’amis au restaurant Stammtisch de Sarrebourg en 1933. Le terme Stammtisch correspond également à la table des habitués où se réunissaient des amis, notamment pour jouer au cartes et déguster une bière. Joseph fréquentait le Stammtisch le mercredi soir, le samedi soir et le dimanche soir.
Joseph Lipp en 1938
Durant la drôle de guerre (hiver 1939 - 1940), des militaires français s’installent sur le terrain des Lipp à Obernai. L’ardoise des militaires indique ici “Hôtel Terminus, entrée interdite” ... on connaît la suite !
Lettre envoyée par les Lipp en juin 1942 à leur fille Alice. Ce courrier a été ouvert et vérifié par la censure nazie
Joseph Lipp et sa femme Célestine durant l’été 1948
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Joseph Lipp 1914
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Joseph Lipp et l’entreprise Alsatia
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Les cartes d’alimentation ont été instituées par les autorités françaises durant la drôle de guerre. La carte ci-jointe a été délivrée à Joseph Lipp le 1er juin 1940.
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