[./joseph_lipp_alsatiapag.html]
Joseph Lipp et l’entreprise Alsatia
Joseph Lipp, un Alsacien dans la Grande Guerre
Carte postale envoyée du camp de Bitsch par Joseph à sa femme Célestine le 2 janvier 1915 pour lui présenter ses voeux. La photo a été réalisée devant l’un des baraquements. Les trois autres soldats présents sur le clcihé ont signé la carte. Il s’agit des réservistes Nicolaus Heiny, Emil Schuster et E.Schmitt. Il est à noter que les épouses de ces deux derniers ont également signé cette carte. E.Schmitt accompagnera Joseph Lipp durant le conflit puisqu’il signera encore une carte envoyée par Joseph à sa femme le 23 janvier 1917 depuis la Russie. Nicolaus Heiny (à l’extrême-droite) venait de Weislingen, situé à quelques kilomètres de Drulingen. Il sera tué le 17 avril 1918 à Vieux Berquin (Nord).
Suite à l’assassinat de l’Archiduc François Ferdinand, héritier du trône d’Autriche-Hongrie, le 28 juin 1914 à Sarajevo, les systèmes d’alliance en place vont progressivement entraîner les grandes puissances européennes dans un conflit généralisé. Ce sont tout d’abord l’Autriche-Hongrie et la Serbie qui entrent en guerre. La Russie, alliée de la Serbie, mobilise ses troupes le 28 juillet contre l’Autriche-Hongrie, puis le 29 juillet contre l’Allemagne, alliée de cette dernière. En Allemagne, l’état de “danger de guerre” est proclamé le 31 juillet à midi. Le 1er août, la mobilisation générale est décrétée et l’Allemagne déclare la guerre à la Russie. La France, alliée de la Russie, mobilise ses troupes le 2 août. Le 3 août, l’Allemagne déclare la guerre à la France et viole la neutralité belge. Le 4 août, l’Angleterre déclare à son tour la guerre à l’Allemagne : le carnage peut commencer...
Durant l’année 1914, les fronts occidentaux et orientaux évoluent très différemment : - à l’Ouest, selon le plan Schlieffen, l’Allemagne attaque avec le gros de ses forces la Belgique, la France et le corps expéditionnaire britannique. L’objectif est une victoire stratégique en trois à quatre semaines avant que la Russie n’ait le temps de mobiliser ses troupes à l’Est. Après une courte phase de guerre de mouvement très favorable à l’armée allemande mais sans victoire décisive, le front se stabilise en septembre 1914 dans une guerre de position qui va durer plus de trois années. - à l’Est, les premières semaines des combats voient la Prusse Orientale, mal défendue, envahie par l’armée russe, qui a réussi une mobilisation rapide. Cette menace oblige l’état-major allemand à rapatrier du front Ouest des unités dont l’absence est déterminante en septembre 1914 lors de la bataille de la Marne (2). L’attaque russe est anéantie le 27 août durant la bataille de Tannenberg. Par la suite, l’armée allemande va tenter de libérer totalement ses territoires envahis. Globalement durant la fin de l’année 1914, le front oriental reste caractérisé par la guerre de mouvement. Le front oriental aura une importance majeure durant le premier conflit mondial. Il est pourtant largement oublié dans les livres d’histoire francophones. La France espérait notamment que l’armée russe pourrait fixer un maximum de divisions allemandes durant le conflit. L’Etat français va donc en permanence participer à l’équipement de l’armée russe. Par rapport à la Russie, l’Allemagne dispose en 1914 de troupes homogènes et d’une grande qualité. L’encadrement et le commandement de l’armée allemande sont également très supérieurs. Le soldat allemand a enfin, contrairement aux Russes, un bon niveau d’instruction et l’expérience d’entraînements et de manoeuvres suivis au cours de nombreuses périodes militaires. L’armé russe compense ses handicaps par une écrasante supériorité numérique et par la grande faiblesse des troupes austro-hongroises sur son flanc Sud (6).
Bibliographie générale : 1 : Collectif (1919) Histories of 251 divisions of the german army (1914-1918), compiled from records of intelligence section of the general staff, American Expeditionary forces 2 : J.C.Laparra (2006) La machine à vaincre : l'armée allemande 1914-1918, p.299 3 : W.Lasch (1921) Erinnerungsblätter deutscher Regimenter, Herausgegeben unter Mitwirtung des Reichsarchivs, 3.Unterelsässisches Infanterie-Regiment Nr. 138, Oldenburg 4 : W.Flex (1916) Le pélerin entre deux mondes (Der Wanderer zwischen beiden Welten), Paris 5 : W.Lasch (1937) Geschichte des 3.Unterelsässisches Infanterie-Regiment Nr. 138 1887-1919, Saarbrucken 6 : A.Clark (1971) The eastern front 1914-18 : suicide of the Empires
[./indexpag.html]
[./joseph_lipppag.html]
Biographie générale de Joseph Lipp
[./joseph_lipp_1914pag.html]
Août 1914 à janvier 1915 : Truppen-Übungsplatz Bitsch
Vue du Truppen-Übungsplatz Bitsch en 1914
Le camp de Bitsch est un terrain de manoeuvres (Truppenübungsplatz) permettant d’entraîner les unités de réserves provenant des régions occidentales de l’Empire. Les réservistes évitent au cours de l’été 1914, les combats meurtriers des premières semaines du conflit. Mais la guerre s’éternise et les risques d’être envoyés au front sont de plus en plus élevés. Joseph Lipp séjourne dans ce camp durant plus de cinq mois. Il y fait successivement partie de la 5e compagnie (carte postale du 15 novembre 1914) puis de la 4e compagnie (le 23 janvier 1915). Le quotidien du camp consiste en exercices de combat, en marches et en patrouilles ainsi qu'en de nombreuses corvées, notamment des travaux de terrassement (2).
Joseph Lipp (à droite) en compagnie de son frère cadet Eugène. Cette photographie a été prise dans la forêt entourant le camp de Bitsch durant la fin de l’année 1914. Eugène Lipp, ici âgé de 25 ans, était natif comme l’ensemble de la famille Lipp d’Hirsingue dans le Sundgau. Il s’était par la suite établi à Petit-Rederching, village situé à une dizaine de kilomètres de Bitche. Il y travaillait dans une entreprise industrielle. Les deux frères étaient à l’époque en bons termes. Cette photographie est la seule connue où ils figurent ensemble. Ce cliché a été réalisé par Otto Lehmann, photographe à Bitsch.
Carte postale envoyée de Bitsch par un réserviste de l’I.R. 138 pour Noël 1914
Les réservistes en instruction au camp de Bitsch étaient issus pour la plupart de la région. Les cartes postales envoyées par Joseph Lipp concernant cette période indiquent que sa famille pouvait venir lui rendre visite en arrivant directement à la gare du camp (Bahnhof-Lager). Joseph reçoit ainsi la visite de son frère Eugène et à plusieurs reprises de son épouse. Il demande par contre à cette dernière le 14 novembre 1914 de ne plus emmener leurs deux enfants à sa prochaine visite car leur dire au revoir lui est trop insupportable.
Joseph Lipp est mobilisé comme les autres réservistes allemands le 2 août 1914. Il est incorporé au régiment d’infanterie N°138 (3.Unter-Elsässisches Infanterie-Regiment Nr. 138, ou I.R.138). Ce régiment est partie intégrante de la 42e division dont voici la composition de 1914 à 1918 (1). Infanterie : 59. Infanterie-Brigade 1. Oberrheinisches Infanterie-Regiment Nr. 97 (jusqu’en 1915) 3. Unter-Elsässisches Infanterie-Regiment Nr. 138 (suite au départ de l’I.R. 97, l’I.R. 138 est intégré à la 65 Brig.) 65. Infanterie-Brigade 4. Westfälisches Infanterie-Regiment Nr. 17 (Graf Barfuß) 2. Lothringisches Infanterie-Regiment Nr.131 Cavalerie : 1. Westfälisches Dragoner-Regiment Nr. 7 Artillerie : 42. Feldartillerie-Brigade 1. Rheinisches Feldartillerie-Regiment (von Holtzendorff) Nr. 8 (jusqu’en 1916) 1. Ober-Elsässiches Feldartillerie-Regiment Nr. 15 Pionnier : 2. Rheinisches Pionier-Bataillon Nr. 27 La 42e division était donc composée à parts à peu près égales de recrues provenant d’Alsace, de Westphalie, de la région Rhénane (Cologne) et de Lorrains. Dans l’armée allemande, les régiments et les divisions étaient créés et recrutés de façon régionale afin de renforcer leur cohésion. L’Allemagne était en effet un jeune pays, peu homogène, où les identités régionales prévalaient encore assez largement sur l’idée nationale. Il était ainsi complexe de faire cohabiter les Prussiens avec les minorités situées aux marges de l’Empire, notamment les Bavarois, les Polonais, les Alsaciens, les Mosellans ou les Danois. Les Bavarois étaient indépendants dans la formation de leurs divisions. Pour les autres minorités, les recrues étaient en général mélangés avec des Allemands issus des régions limitrophes : de Silésie et de Prusse Orientale pour les Polonais, du Schleswig-Holstein pour les Danois, de Rhénanie et du Wurtemberg pour les Alsaciens et les Mosellans (1). L’état-major estimait ainsi que les minorités seraient encadrées puis assimilées au contact des “vrais Allemands”. Ce calcul habile a fonctionné durant la majeure partie de la guerre. Malgré tout, à partir de l’été 1918, la baisse générale du moral de l’armée allemande a particulièrement frappé ces unités ce qui a nettement abaissé leur capacité de combat (2).
En août 1914, l’armée allemande est largement pourvue en soldats effectuant leur service militaire ainsi qu’en jeunes réservistes (2). Six années après avoir terminé son service militaire, Joseph Lipp, âgé de 27 ans, n'est donc pas immédiatement incorporé dans une unité combattante. Il rejoint le 7 août le camp militaire de Bitsch (Bitche - Moselle) en tant qu’ersatzreservist.
A la suite des pertes terribles subies par l'armée allemande durant l'année 1914, les réservistes sont progressivement incorporés dans des unités combattantes (2). L’I.R. 138 a ainsi perdu 827 hommes (302 morts et 525 disparus) durant les cinq mois de combat de l’année 1914. Ce chiffre représente 28 % de ses effectifs (environ 2900 hommes). A cela il faut ajouter 1695 hommes blessés, dont une part n’a pas pu être renvoyée au front par la suite (3). Cela représente 2522 hommes touchés de façon plus ou moins grave, soit 87% des effectifs ! Pour Joseph Lipp, cette incorporation semble intervenir au moment du transfert du I.R.138 du front occidental vers le front oriental. Ce transfert est effectué en train du 29 janvier au 1er février 1915 de Sedan jusqu'à Konigsberg (actuel Kaliningrad) (3). Au début de l’année 1915, le général allemand Ludendorff réussit en effet à convaincre l’état-major allemand et le Kaiser de porter un effort de guerre décisif sur la partie Nord du front oriental. Les troupes positionnées à l’Est sont donc considérablement renforcées à partir d’unités servant en France et de réservistes. Les régiments comportant de nombreux Alsaciens, comme c’est le cas de l’I.R. 138, sont très majoritairement transférés sur le front oriental.
Carte postale conservée par Joseph Lipp après la guerre représentant différentes vues de Bitsch, notamment les “Baracken” du camp.
[./joseph_lipp_1915pag.html]
[./joseph_lipp_1916pag.html]
[./joseph_lipp_1917pag.html]
[./joseph_lipp_1918pag.html]
[./joseph_lipp_1907pag.html]
[./joseph_lipp_1918pag.html]
[./joseph_lipp_1917pag.html]
[./joseph_lipp_1916pag.html]
[./joseph_lipp_1915pag.html]
[./indexpag.html]
[./joseph_lipp_1907pag.html]
Carte postale représentant le camp et les baraquements au lieu dit de Kindelberg.
Section de huit hommes appartenant à l’I.R. 138, au cours de manoeuvres dans les bois entourant le camp
[Web Creator] [LMSOFT]